Le gaz de schiste n’est pas rentable, ce sont les patrons d’Exxon et de Total qui l’avouent


Dès le début 2011, un certain nombre de personnes se demandaient ce qui se cachait derrière la frénésie foreuse aux USA. Frénésie qu'ils semblaient désireux d'exporter partout dans le monde et en particulier sur notre territoire. Lors des réunions d'information auxquelles j'ai participé, je n'omettais jamais cette dimension spéculative même si elle n'entraînait pas forcément l'approbation des auditoires. Il est vrai que le lobbying des foreurs et leur argumentation (emploi, indépendance énergétique, prix de l'énergie) avait de quoi séduire.

Dans un précédent article de janvier 2012, (-->ici<--) je faisais le bilan des diverses informations accréditant la thèse de la bulle spéculative. aujourd'hui, ce sont les foreurs eux-mêmes qui avouent la non rentabilité de l'exploitation des gaz de schiste. Alors, explosion future où ajustements qui rendront cette exploitation nettement moins séduisante?...

 


Jusqu'à présent, le débat sur le gaz de schiste a surtout opposé les arguments écologiques des défenseurs de l'environnement aux arguments économiques de ceux qui y voient un gisement de profits et d'emplois. Cela pourrait changer.

 

Les déclarations des PDG de deux géants des hydrocarbures ne devraient pas manquer de relancer le débat. Et pour cause : peu habitués aux déclarations fracassantes, ils avouent tous les deux que le gaz de schiste n'est pas rentable !

 

 

 

Le 27 juin 2012, Rex Tillerson, le président d'Exxon Mobil déclarait en marge du Council on Foreign Relations :

« Nous sommes tous en train de perdre tous nos chemises aujourd'hui. Nous ne faisons pas d'argent. Tous les signaux sont au rouge.»

Dans Le Monde daté du 11 janvier, c'est au tour de Christophe de Margerie, le PDG de Total de passer aux aveux :

- Total a investi dans les gaz de schiste, au Texas et dans l'Ohio. Quel bilan en tirez-vous ?

- Ce n'est pas terrible, car nous avons investis sur la base de prix du gaz beaucoup plus élevés que ceux d'aujourd'hui. Notre acquisition au Texas se traduit par une perte sérieuse (...)

- Allez-vous continuer vos investissements ?

- Il est clair qu'on met la pédale douce. Je ne vois pas l'intérêt d'aller investir - je précise bien dans les gaz secs - là où la rentabilité n'est pas au rendez-vous.

Le problème est clairement identifié : le gaz de schiste coûte actuellement plus cher à produire que son prix de vente. Voici les chiffres avancés par Christophe de Margerie lui-même (pour le Texas) :

"Nous avions fait nos études de rentabilité sur un prix qui était à plus de 6 $ le million de BTU, aujourd'hui on est à 3,2 $ et ça ne passe pas !"

LaTribune.fr a publié une analyse signée par Robert Bell et Oleg Rusetsky qui apportent des précisions sur l'état du secteur aux Etats-Unis :

"Chesapeake Energy, un des leaders de l'industrie américaine, pourrait se trouver en faillite [en 2013] si l'entreprise ne réussissait pas à couvrir sondéficit de trésorerie d'environ 22 milliards de dollars.

En août 2012 BHP Billiton Ltd a dû réduire de 2,84 milliards de dollars la valeur d'une partie de ses actifs en gaz de schiste aux États-Unis, lesquels avaient été achetés 4,75 milliards de dollars seulement dix-huit mois plus tôt.

En juillet, deux autres sociétés, BG Group Plc. et Encana Corp, ont annoncé une réduction de plus de 3 milliards de dollars de leurs actifs en gaz de schiste."

Des montants faramineux investis dans une industrie qui ne parvient pas à gagner de l'argent, ça ravive quand même le souvenir de la ruée vers l'or.com, qui mena à l'éclatement de la bulle Internet au tournant de l'an 2000.

Alors, bulle ou pas bulle ? Voilà désormais le vrai débat à mener, et enrichir, sur le gaz de schiste. L'économie mondiale, encore très fragilisée, n'aurait vraiment pas besoin d'une nouvelle déflagration.

 



13/01/2013
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