Une 02/01/2018
Comment souhaiter de bonne fêtes.
Pardon pour cet article un peu en dehors des clous. Les temps sont aux vœux, on se souhaite de bonnes fêtes en attendant de se souhaiter "bon appétit" et de pester parce qu'on aura abusé du champagne ou du foie gras.
C'est plus fort que moi, j'en suis désolé, mais mon cœur n'est pas à la fête.
De bonnes fêtes quand on déchire les pauvres abris de migrant en pleine période de froid? Quand on compte les morts de la rue, les enfants sans toit, les femmes seules et violentées, tous ces terriens qu'on pourchasse, qu'on mutile, qu'on assassine?
Bien sur on va essayer de faire un petit break, souffler quelques instants, se dire qu'on n'y peut pas grand chose, que la France ne peut accueillir toute la misère du monde, pas plus que nous ne pouvons pleurer sur toutes les injustices, les crimes, les renoncements, les abandons, l'indifférence glaciale.
On va faire comme toujours, quelques emplettes festives, un ordinaire au parfum de fête, même si on est seuls, même si les autres nous tournent le dos, même si nous savons bien que demain n'aura pas un parfum différent et que cette parenthèse ne peut masquer le vide.
On va donc dire aux autres qu'on leur souhaite de bonnes et belles fêtes, même si on sait bien que nos vœux ne peuvent rien à l'affaire. On va faire comme si.
Comme si la vie était belle, douce, suave... Faire comme si ce pauvre père Noël pouvait arrêter son traineau devant tous les domiciles, comme si chacun avait un domicile.
Nous allons un instant faire comme si nos souhaits les plus chers pouvaient se réaliser, comme si la violence, la haine, la terreur avaient un instant disparu. Comme si la rumeur s'était tue.
Nous allons oublier ceux qui ont faim, froid, les réfugiés, les déboutés, ceux qui repartent pieds nus dans la neige, ceux qui meurent happés par un camion sur une autoroute française, ceux qui ont vu le rivage s'éloigner enfin, pleins d'espoir, et qui ne verront jamais l'autre rive, ceux qui dorment au pieds de nos immeubles, ceux qui grelottent et se meurent.
L'heure est aux menus festifs, aux tables que l'on dresse.
Mais demain? En serons-nous meilleurs, plus compatissants, plus attentifs? Ces quelques jours ne peuvent effacer ce qui pèse sur le monde.
Dans la légèreté des bulles, je vous souhaite néanmoins de pouvoir, ne serait-ce qu'un instant, éloigner la tristesse de vos vies, balayer un peu de cette poussière accumulée, et retrouver juste un peu d'espoir pour repartir meilleurs. Qu'au moins quelques uns d'entre nous fassent table rase de leurs angoisses, de leurs rancœurs, délaissent la haine et le ressentiment et voient dans l'avenir une petite lueur d'espoir.
Je vous souhaite de ne pas tout à fait désespérer.