Les mois se suivent mais l’industrie du gaz de schiste ne renonce pas… Du moins en France :
lors que le reste de la planète, hormis l’Angleterre qui montre une obstination au moins égale à la notre, se détourne de cette source d’énergie, les lobbys gaziers en France ne lâchent pas prise.
Dernier épisode en date, le tribunal de Cergy-Pontoise qui, le 28 janvier, a donné raison à TOTAL, en annulant la décision de l’Etat d’abroger le permis de recherche de gaz de schiste dans la région de Montélimar. Cette même juridiction avait pourtant repoussé une requête similaire de la société Schuepbach, titulaire des permis de gaz de schiste de Nant et de Villeneuve-de-Berg. Le Tribunal avait alors jugé l’abrogation parfaitement légale. Rappelons que la loi du 14 juillet 2011 interdisant la fracturation hydraulique prévoyait que les titulaires de permis rendent un mémoire précisant les techniques employées ou envisagées dans le périmètre de leur permis de recherche. Le pétrolier TOTAL avait alors fort habillement précisé qu’il n’utiliserait pas la fracturation hydraulique, mais des « techniques qui seront alors disponibles ». C’est face au flou de ces précisions sur les techniques de substitution envisagées que l’état avait estimé que TOTAL ne respectait pas les termes de la Loi. Le permis avait donc été abrogé, la fracturation hydraulique restant la seule technique permettant d’accéder au gaz. Apparemment, le tribunal, suivant les recommandations du rapporteur public a jugé que le flou d’hier était devenu limpide aujourd’hui… Ou alors, on nous aurait caché de nouvelles techniques sures et protectrices de l’environnement.
Difficile aujourd’hui de deviner ce que Total va bien pouvoir faire de cette décision. Premier élément à prendre en considération, le pétrolier n’est pas en mesure de commencer des prospections puisque le permis, accordé en mars 2010 pour une durée de 5ans, s’est éteint en mars 2015. D’autre part, son PDG a déclaré : "Je n'ai pas envie de passer en force sur ce sujet-là. Si la collectivité nationale ne souhaite pas qu'on fasse d'exploration de gaz de schiste, nous ne le ferons pas, je pense qu'il faut qu'il y ait un consensus sur un sujet pareil."
Donc, pas d’exploration contre l’avis du gouvernement. A ce propos, la position du président Hollande ne semble pas avoir changé, il reste sur un refus de cette exploitation. La ministre de l’environnement a expliqué que "La loi sur la transition énergétique (de 2015) fixe pour objectif de réduire de 30 % la consommation d'hydrocarbures d'ici 2030 : la loi rend nécessaire une révision globale de la politique en matière d'exploration d'hydrocarbures pour s'inscrire durablement dans la lutte contre le changement climatique", annonçant dans le même temps que l’Etat faisait appel de cette décision du tribunal de Cergy.
Et bien, me direz-vous, plutôt rassurant tout ça ! On pourrait le croire en effet, seulement, il ne vous aura pas échappé qu’en 2017 la France retournera aux urnes et une possible alternance pourrait rebattre les cartes. En effet, le 14 février, Luc Chatel, le tout nouveau président du Conseil national des Républicains en appelle au "principe d'innovation" et rajoute "Les Républicains doivent être le parti du principe d'innovation plus que du principe de précaution, le parti du gaz de schiste, des OGM, des biotechs, j'ai cette intime conviction."… Qu’il ait éprouvé le besoin d’une pareille affirmation dans un discours d’investiture témoigne de la présence forte de cette problématique dans la réflexion des dirigeants « Les Républicains » et probablement d’une présence non dissimulée des lobbies gaziers.
L’heure n’est donc pas au relâchement de la vigilance. La loi de 2011, nous étions nombreux alors à le signaler, était une loi à minima, ne portant que sur la technique d’exploitation, incapable de nous protéger durablement des appétits des foreurs. Restons-en à la déclaration de Ségolène Royal à l’Assemblée Nationale annonçant « qu’aucun permis d’extraction ne serait accordé ou reconduit. Après l’Accord de la COP 21 à Paris, les énergies fossiles doivent rester dans le sol et la transition vers des énergies décarbonnées mise en œuvre. »
Nous saurons le rappeler sans faiblir.