Les mensonges de Lellouche ou quand l'UMP s'inspire du FN.
Le député Lellouche s’est laissé aller à un grand numéro de mensonge. Il a aligné les contre-vérités et des chiffres inventés ou manipulés. Voyons un peu…
2 MILLIONS D’IMMIGRÉS SUPPLÉMENTAIRES EN 10 ANS ? 8 MILLIONS EN 40 ANS ?
«La France subit un flux migratoire sans précédent dans son histoire par son ampleur et sa durée, de l’ordre de 200 000 entrées légales par an en moyenne. […] Deux cent mille entrées légales par an pendant dix ans, cela fait deux millions de personnes ; multipliées par quarante ans, cela fait huit millions de personnes, sans compter les enfants de ces dernières !»
Tout est faux ! Selon l’Insee, 200 000 immigrés sont bien entrés sur le territoire chaque année entre 2004 et 2012. Mais la multiplication de Lellouche n’a aucun sens. Chaque année, environ 60 000 immigrés quittent en effet notre pays. Oublier ces sorties, c’est à tout le moins malhonnête. Marine Le Pen fait c’est vrai les mêmes calculs avec les mêmes conclusions… Aïe…
D’autre part, extrapoler les flux depuis 2004 aux 40 dernières années est pure malhonnêté intellectuelle. Le flux migratoire se situait autour de 100 000 au milieu des années 90.
Rappelons pour terminer que toujours selon l’Insee, 5,8 millions d’immigrés vivaient en France en 2013 et non pas les 8 millions annoncés
93% DE CES IMMIGRÉS VIVENT DE L’ASSISTANCE
«Il faut rappeler que sur ces 200 000 entrées légales, seules 7% sont liées au travail, tout le reste de ces personnes vivent de revenus d’assistance divers.»
Le voilà qui reprend sans vergogne le discours bien rodé du FN.
En 2012, environ 8,5% des titres de séjour accordés l’ont été au motif professionnel, soit quelque 16 000 sur un total de 191 000. On trouve dans cet ensemble des salariés, scientifiques, artistes, saisonniers. Tous étaient en possession de contrats de travail au moment de l’obtention de leur titre de séjour. Le mensonge ici consiste à prétendre que tous les immigrés qui entrent en France ne travailleront pas et se destinent à «vivre de revenus d’assistance divers.
Plutôt que ces assertions absurdes, regardons les statistiques de l’Insee (Mr Lellouche ne doit pas les lire souvent…).
En 2010, 59% des immigrés de plus de 15 ans vivant en France et étant originaires d’un pays hors UE étaient en activité (en emploi ou en recherche d’emploi), contre 57% pour les non-immigrés. Par contre, le taux de chômage des immigrés de plus de 15 ans hors UE était de 20%, contre 9% pour celui des non-immigrés. Preuve que l’accès à l’emploi des immigrés est plus difficile. On est loin des 95% annoncés.
Une autre étude étude de l’Insee montre que les immigrés sont de plus en plus diplômés : «63% des immigrés entrés en France en 2012 sont au moins titulaires d’un diplôme de niveau baccalauréat ou équivalent. […] Entre 2004 et 2012, toutes origines confondues, la part des immigrés ayant un diplôme au moins équivalent au baccalauréat a augmenté de 7 points, dont 2 points entre 2009 et 2012.»
SEULS 5% DES DÉBOUTÉS DU DROIT D’ASILE REPARTIRAIENT DANS LEURS PAYS
«L’immense majorité des déboutés demeure sur le territoire national, à peine 5% faisant l’objet de mesures d’éloignement.»
Il est vrai qu’un grand nombre de déboutés du droit d’asile restent en France, mais l’estimation de leur nombre reste sujette à caution. La raison en est simple : cette statistique n’existe pas. Il n’y a aujourd’hui aucun moyen de distinguer et comptabiliser les déboutés parmi les immigrés reconduits à la frontière ou les immigrés partant dans le cadre d’un retour aidé. Donc, tout chiffre avancé est forcément pure fantaisie.
LA COUVERTURE MÉDICALE DES SANS PAPIERS, UNE INVENTION DE LA GAUCHE ?
«En France, et nulle part ailleurs dans le monde, n’importe qui, venant de n’importe où, sans le moindre document d’identité, peut gratuitement se faire soigner sans limites ni contraintes, grâce à la fameuse aide médicale d’État instituée par Lionel Jospin.»
Encore un énorme mensonge. la justification de son identité est une condition incontournable de l’accès à l’Aide médicale d’Etat (AME). L’aide n’est accessible que sous un seuil de ressources. Dernier élément, « le panier de soin » demeure inférieur à celui dont bénéficient gratuitement également les quelque 4,5 millions de Français et étrangers en situation régulière bénéficiaires de la CMU-C.
Lellouche ment encore en accusant Jospin d’avoir institué le droit à un étranger sans papier de se faire soigner. Jusqu’en 1993, la régularité de séjour n’était pas une condition d’accès à l’assurance maladie. Après 1993, les sans papiers sont écartés de l’assurance maladie, mais continuent comme les Français les plus démunis, à bénéficier de l’Aide médicale départementale (AMD), qui leur permet également de se soigner.
LA GAUCHE RESPONSABLE DE L’EXPLOSION DU NOMBRE DE DEMANDEURS D’ASILE ?
«Je rappelle que Manuel Valls a réduit de près d’un quart le nombre d’expulsions d’étrangers en situation irrégulière […]. Dans le même temps, le nombre des régularisations explosait. Idem pour les naturalisations. […] Il ne faut pas s’étonner de voir le nombre de demandeurs d’asile bondir à 65 000 en 2013, soit le double d’il y a sept ans !»
Ben voyons ! La gauche responsable de tous nos maux. En fait, la demande est en hausse continue en France depuis 2007…
Cette hausse est liée à la situation internationale et aux crises qui se sont multipliées ces dernières années. Tous les pays du monde sont touchés, la France l’étant plutôt moins que certains autres pays européens.
Sur les six premiers mois de l’année 2014, les demandes sont stables en France. De 13 715 demandes au premier trimestre 2012, on est passé à 13 848 demandes au deuxième trimestre 2014. Dans d’autres pays, à l’inverse, les demandes ont été multipliées par trois ou quatre sur la même période. Du premier trimestre 2012 au deuxième trimestre 2014, on est passé de 12 300 à 33 436 demandes en Allemagne, de 3 748 à 14 136 en Italie, de 7 553 à 17 226 en Suède. Qu’en dit Mr Lellouche ?
LA FRANCE PLUS GÉNÉREUSE AVEC LES DEMANDEURS D’ASILE ?
«L’ATA représentait en 2013 un versement mensuel de 336 euros pour un mois de trente jours pour un adulte seul. Ce montant est significativement supérieur à celui perçu par les demandeurs d’asile en Allemagne – 224 euros –, en Belgique – 240 euros –, au Royaume-Uni – 172 euros à 211 euros –, en Suède – 210 euros –, ou bien encore en Italie, où un montant de 500 euros mensuels est versé dans la limite de trente-cinq jours.»
L’allocation temporaire d’attente (ATA) est versée pendant l’instruction la demande pour ceux qui ne sont pas hébergés en Centre d’accueil des demandeurs d’asile (Cada). Il s’agit d’un versement de 11,35 euros par jour et par adulte, ce qui fait 340 euros par mois. L’allocation a été créée en 2006, en conformité avec une directive européenne de janvier 2003 relative aux normes minimales d’accueil des demandeurs d’asile.
Pierre Lellouche oublie de préciser qu’à la différence des pays cités, l’ATA ne tient pas compte des enfants. Ainsi, un adulte percevra en France 11,35 euros par jour seul, ou avec deux enfants. Dans les pays voisins, un supplément est octroyé en fonction de la composition familiale (entre 100 et 200 euros par enfant).
Pour terminer, quand Lellouche nous compare à l’Allemagne, (une idée fixe à droite)en prétendant que l’aide s’y élève à 224 euros, il est juste en retard. La Cour constitutionnelle fédérale de Karlsruhe a en effet ordonné en 2012 une réévaluation de cette aide sociale, estimant que son montant était contraire à la dignité. L’allocation a été portée au niveau des minima sociaux à 336 euros par mois. Soit exactement le montant français (en 2013). Début novembre, le Bundestag a voté le principe d’une nouvelle revalorisation du dispositif.
Mais là, le modèle allemand n’intéresse plus Mr Lellouche.
On reste confondu devant tant de malhonnêteté, tant de mensonges distribués sans la moindre retenue. Ce discours, qui s’inspire clairement de l’argumentation du FN ne peut qu’inquiéter. Il est vrai que le chef Sarkozy ne se gêne pas lui non plus dans ses meetings pour abreuver son auditoire des pires contre-vérités.
Ces gens ne grandissent pas la politique.
D'après Libération