Le bateau ivre
Je réfléchissais ce soir à l’expression « ils nous mènent en bateau » qui correspond si bien à la situation actuelle. Je me disais qu’en effet, nous sommes toutes et tous sur un bateau ivre. Un bateau qui prend l’eau de toutes parts. Ses propriétaires en ont décidé la perte. Corps et âmes ! Alors, l’heure n’est pas au rêve. Inutile de proposer une île paradisiaque aux pauvres voyageurs menacés que nous sommes. Le navire va couler et nous avec. Il n’est pas l’heure de rêver d’un autre navire, il arriverait trop tard ! Il faut lutter pour que le bateau reste sur l’eau. Nous devons tout faire pour éviter que le naufrage ne nous emporte. Chacun verra bien l’allégorie.
« Ils » ont décidé la fin du système. « Ils » ont décidé de nous emporter avec ce qu’il en reste. Dans l’immédiat, nous devons juste nous battre pour qu’«ils» ne réussissent pas.
Nous sommes dans l’urgence vitale.
Nous réfléchirons plus tard à ce que devrait être le nouveau bateau ou le port où nous aimerions nous reposer. Ne pas sombrer, ne pas céder, ne plus accepter l’inacceptable.
Ni gauchistes, ni révolutionnaires, ni indignés, ni gauche ni droite, juste refuser de crever sous leurs bottes, leurs foreuses ou leurs dollars. Juste des humains accrochés à leur terre, leurs cailloux, leur landes, leurs garigues, leurs pins, leur causses, leurs rivières, leur vent, leur soleil. Nos pieds ancrés dans la poussière de nos terres privées d’eau, nous sommes le lien entre la terre et la lumière, entre passé et avenir. Nos valeurs n’ont pas de prix, ne sont pas cotées en bourse : pas de perspective de plus value. Nous n’avons pas de prix. Nous ne sommes pas achetables. Nous voulons juste continuer à compter les levers de soleil, Faire des vœux au passage des étoiles filantes. Nous n’avons d’autre richesse que notre humanité, ils n’ont d’autre défaut que leur inhumanité.
Ils nous mènent en bateau. Que chacun prenne simplement une rame. Le naufrage n’est pas irrémédiable.