Selon d'innombrables études, le méthane élimine les effets bénéfiques du gaz de schiste sur le climat.
On aurait tort de s'endormir pour tout ce qui touche aux hydrocarbures non conventionnels. L'Amérique s'est réengagée les yeux fermés dans l'exploitation à outrance de son sous-sol, et cela pourrait donner des idées aux foreurs entêtés de ce côté de l'Atlantique.
Alors, n'hésitons pas à nous répéter et à mettre sans relâche sur la table les dangers de cette exploitation. On ne sait jamais!
Traduction personnelle d'un article de Think Progress écrit par Joe Romm.
a fracturation hydraulique n'est pas bonne pour le climat. Ou, pour le dire un peu plus scientifiquement,"Au moment où le gaz naturel aura un net avantage climatique, vous serez probablement mort et le climat sera ruiné", comme je l'ai écrit il y a deux ans.
De nouvelles données satellitaires et des observations de surface analysées par les chercheurs de Harvard confirment les données et observations antérieures: les émissions de méthane aux États-Unis sont considérablement plus élevées que ne le montrent les chiffres officiels de l'EPA (agence américaine de l'environnement). Fait significatif, les chiffres de l'EPA sont principalement basés sur des estimations fournies par l'industrie, et non sur des mesures réelles.
Bien que cette nouvelle étude n'attribue pas une source précise à l'augmentation remarquable de 30% des émissions de méthane aux États-Unis entre 2002 et 2014, de nombreuses autres études ont identifié la source de ces émissions comme étant les fuites de méthane provenant du système de production et de livraison de gaz naturel.
Le principal problème climatique est que le gaz naturel est essentiellement du méthane (CH4), un gaz à effet de serre super-puissant, qui emprisonne 86 fois plus de chaleur que le CO2 sur une période de 20 ans. C'est pourquoi de nombreuses études ont montré que même un taux de fuite très faible peut avoir un impact important sur le climat - suffisamment pour mettre fin à l'avantage de passer du charbon au gaz pendant une longue période.
Pire encore, d'autres études constatent - surprise, surprise - que les centrales au gaz naturel ne remplacent pas uniquement les centrales à charbon à haute teneur en carbone. Ils remplacent souvent des sources d'énergie à très faible teneur en carbone comme le solaire, l'éolien, le nucléaire et même l'efficacité énergétique. Cela signifie que même un taux de fuite très faible annule les éventuels avantages climatiques de la fracturation hydraulique.
En effet, des chercheurs ont confirmé en 2014 que - même si les fuites de méthane étaient nulles - "l'utilisation accrue de gaz naturel pour l'électricité ne réduiraient pas substantiellement les émissions de GES[gaz à effet de serre] des États-Unis, et en retardant le déploiement de technologies d'énergie renouvelable, pourrait en fait exacerber le problème du changement climatique à long terme". En fait, une étude effectuée le mois dernier a révélé que le gaz naturel et les énergies renouvelables se font directement concurrence pour remplacer les centrales au charbon au Canada.
Toutes ces constatations confirment les préoccupations sur les taux de fuite élevés, soulevées par les professeurs Howarth, Santoro et Ingraffea de Cornell, que j'ai rapportées en 2011. Howarth a déclaré à Climate Central cette semaine que l'augmentation des émissions de méthane " doit très certainement provenir de la décomposition et de l'augmentation de l'utilisation du gaz naturel ". Howarth note que même avec des réductions importantes de CO2, nous nous dirigeons vers un réchauffement dangereux de 2°C d'ici le milieu du siècle.
Mais la planète réagit beaucoup plus rapidement au méthane, si bien qu'une réduction des émissions de méthane " ralentirait immédiatement le rythme du réchauffement climatique ", a-t-il déclaré.
La bonne nouvelle, c'est que les énergies renouvelables sont prêtes à "servir" une économie moderne, de sorte que nous n'avons pas besoin de compter sur le gaz naturel comme "pont" vers un avenir sans carbone. La mauvaise nouvelle, c'est que beaucoup de gens vantent encore les prétendus avantages climatiques de la révolution du gaz de schiste - malgré le manque d'observations et d'analyses à l'appui de ce point de vue et la pléthore de données et de recherches qui le contredisent.