Etats-Unis : un rapport sur le gaz de schiste critiqué pour conflit d'intérêts

Lorsqu'on dit et répète que l'industrie du gaz ne recule devant rien pour imposer sa main mise sur la planète. On ne peut accorder aucun crédit à tous les prétendus rapports favorables à cette industrie. Mr Allègre qui fait si souvent référence aux USA pour justifier l'exploitation en France devrait avec profit lire cet article. Le conflit d'intérêts est bien la pire gangrène de nos sociétés.

Rendu public en février à Vancouver (Canada) au cours du congrès annuel de l'American Association for the Advancement of Science (AAAS), le rapport était crédité comme faisant la part des choses, entre les faits et les fantasmes relatifs au gaz de schiste. Réalisé par des chercheurs de l'université du Texas à Austin (Etats-Unis), le document de plus de 400 pages avait été présenté comme dédouanant ces hydrocarbures non conventionnels des maux qui leur sont reprochés en matière d'environnement et de santé.

Quitte à s'arranger un peu avec la réalité ? La question est prise au sérieux par l'université texane qui a diffusé à la presse, mardi 24 juillet, un communiqué annonçant la constitution d'un panel extérieur "pour passer en revue le rapport de l'Energy Institute sur les effets de la fracturation hydraulique". La veille, une organisation non gouvernementale (ONG), le Public Accountability Initiative (PAI), avait publié une analyse critique du rapport en question, dévoilant en outre un conflit d'intérêts de taille. Le géologue Charles Groat, directeur adjoint de l'Energy Institute et premier auteur du rapport, est en effet aussi membre du conseil de direction et actionnaire de PXP, une société de forage spécialisée dans le gaz de roche.

Ce lien d'intérêt n'avait pas été mentionné dans le rapport. M. Groat n'y était présenté que par ses fonctions universitaires et son poste précédent de directeur de l'US Geological Survey (USGS). Selon PAI, qui se fonde sur des documents publics, M. Groat a touché au cours de ces cinq dernières années environ 1,5 million de dollars (1,23 million d'euros) de PXP, directement ou sous forme d'actions. Soit plus que le double de son salaire de professeur d'université.

CHIFFRES ERRONÉS OU OBSOLÈTES

Interrogé par la presse locale, M. Groat a assuré que ses liens avec l'industrie "n'ont pas pesé sur les conclusions de l'étude" puisque son rôle s'était cantonné à la coordination de contributions d'autres auteurs. Pour PAI, le résultat est un rapport bâclé. Plus de 50 sources citées sont improprement référencées. Des chiffres – comme l'estimation des réserves américaines – sont erronés ou obsolètes et la tonalité générale est plutôt favorable aux intérêts industriels.

Le communiqué de presse annonçant ce rapport, intitulé "Une nouvelle étude ne montre aucune preuve de contamination des eaux souterraines par la fracturation hydraulique", repose, selon l'ONG, sur "un langage trompeur et sélectif""Le fait mis en avant dans le communiqué – que la pollution d'aquifères n'a pas été liée à la fracturation hydraulique elle-même – repose sur un tour de passe-passe sémantique, ajoute PAI. L'affirmation ignore plusieurs cas de contaminations provoqués par des aspects de l'extraction distincts de la fracturation de la roche. Le rapport lui-même soulève plus d'une vingtaine de problèmes environnementaux liés à l'extraction du gaz de schiste, largement absents du communiqué de presse."

En outre, le rapport était présenté à la presse comme "indépendant de l'industrie de l'énergie" et "revu par les pairs", ce qu'il n'était pas. PAI note enfin que 13 des 16 membres du conseil scientifique de l'Energy Institute de l'université texane ont des "liens forts" avec le secteur des hydrocarbures. L'université elle-même recevant d'importants subsides de pétroliers comme ConocoPhillips.

Stéphane Foucart

 

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26/07/2012
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