Pourtant nous leur avons dit! Valls découvre le problème des quartiers
près ces séries d’attentats terrifiants, notre premier ministre a dit que peut être n’avons-nous pas vu… peut être n’avons-nous pas compris… peut être n’avons-nous pas pris la mesure des problèmes… peut être n’avons-nous pas été suffisamment vigilants…
Peut-être ?
Peut-être ment-il effrontément !
Lui et ses amis de tous bords, aux commandes de ce pays depuis des décennies n’ignoraient rien de la situation et de son évolution « dans les quartiers »… Ils n’ignoraient rien car nombreux ont été les gens qui, sur le terrain quotidiennement, voyaient l’évolution préoccupante de pans entiers de territoire. Ces gens dont j’ai fait partie ne se sont jamais privé de faire remonter les informations, de tirer les sonnettes d’alarmes… Mais en vain. Services sociaux, enseignants, bénévoles, services de police, nous vivions les quartiers de l’intérieur, nous voyions, nous dénoncions… Les décideurs faisaient la sourde oreille.
Plus de trente ans de travail en Zep, j’ai fait modestement partie de ceux qui tout en faisant l’impossible pour sortir tous ces enfants de l’ornière de la relégation ont alerté, dénoncé, averti.
Alors, quand il fait mine de découvrir une situation critique, notre premier ministre ment.
Il ne peut avoir ignoré l’évolution des quartiers, pas plus qu’aucun des dirigeants de ce pays. Il ne peut l’avoir ignorée parce que nous l’avons dit.
Nous leur avons dit, il y a bien longtemps, que les quartiers devenaient progressivement des ghettos. Que la politique des OPHLM était criminelle en regroupant des gens de même origine et dans la même difficulté sociale.
Nous leur avons dit que les parents d’origine française quittaient le quartier parce que « l’école recevait trop d’enfants immigrés »… Nous leur avons dit que la langue française n’était plus parlée dans la cour de récréation, que les parents sans travail ne se levaient plus le matin pour préparer leurs enfants à se rendre à l’école, que les enfants scolarisés étaient les seuls de la famille à se lever le matin.
Nous leur avons dit que les gens se regroupaient par nationalité d’origine dans les immeubles, parfois même par village d’origine… Nous leur avons dit que les jeunes filles allaient au pays rencontrer un homme choisi pour elles, ne parlant pas un mot de français et revenaient mariées en France. Leurs enfants n’entendant plus alors un seul mot de français à la maison.
Nous leur avons dit que les tensions entre communautés étaient vives dans le quartier, que les « sale arabe » et « sale turc » fusaient à tout propos, que des parents algériens ont retiré leur enfant de l’école parce qu’il y avait « trop d’arabes »… Mais si ! Nous leur avons dit quand les premiers voiles ont fait leur apparition, quand nous n’avons plus pu chanter les mêmes chansons aux fêtes de l’école, quand les vêtements des femmes se sont assombris, que les barbes des hommes ont allongé. Nous leur avons dit quand les femmes ne sont plus venues rencontrer le directeur seules, quand elles n’ont plus serré la main des hommes.
Nous leur avons dit quand le premier niqab a fait son apparition.
Nous leur avons dit que des imams autoproclamés prêchaient dans les caves sans le moindre contrôle, nous leur avons dit quand les enfants sont arrivés le matin à l’école tout fiers d’être allés la veille « à l’école du coran. »
Nous leur avons dit le taux de chômage vertigineux dans ce quartier bâti de toutes pièces à 10km du centre ville, avec pour seul horizon centres commerciaux et zones industrielles.
Nous leur avons dit qu’une visite au centre ville était pour tous les enfants du quartier une découverte et une révélation… Leur univers se limitant à leurs tours… Nous leur avons dit que lors des rencontres sportives, notre école était montrée du doigt, moquée, stigmatisée, même par des collègues d’autres écoles. Nous leur avons dit que nous devions être deux fois plus exemplaires que les autres.
Nous leur avons révélé la présence surprenante de grosses cylindrées au pied des immeubles, nous leur avons dit que la suppression des ilotiers puis du poste de police (Merci N. Sarkozy) était une erreur majeure… (En cas d’urgence, veuillez patienter plus de 20 minutes avant de voir arriver la police…)
Nous leur avons dit que l’école était désormais le dernier service public présent sur le terrain, que nous ne pouvions plus faire face. Nous leur avons dit que les plans successifs d’aménagement ou de financement étaient poudre aux yeux et gaspillage inutile. Nous leur avons dit que l’argent des fameux (à l’époque) DSQ (développement social des quartiers) n’avait rien de social et ne permettait aucun développement. Nous leur avons dit que cet argent (de grosses sommes) était plus destiné à préserver la paix sociale qu’à servir les gens du quartier. Arroser les associations des amis par exemple.
Nous leur avons dit quand dans certaines classes, comme la mienne par exemple, il n'y a plus eu aucun prénom français. Nous leur avons dit quand les fillettes ont été contraintes de porter le voile pour leur entrée en 6ème, Nous leur avons dit quand les garçons en passant le long des grilles de l’école ont changé le traditionnel « bonjour maîtresse » par un agressif « sale pute de blanche »…
Nous leur avons dit que…
La liste serait interminable. Mais nous n’avons été ni écoutés, ni compris, ni respectés dans ce que nous savions. Abandonnés comme les gens des quartiers. Ces gens marginalisés et livrés aux plus offrants, méprisés, frustrés, disponibles pour des idées extrêmes. Et Valls découvre ça aujourd’hui seulement ? Il aura fallu tous ces morts pour réveiller nos politiques endormis ?
Qu’ils cessent donc cette mascarade. Se rappellent aujourd’hui douloureusement à nous des gens qui ont été laissés en marge de notre société.
Qu’il soit bien clair que je ne justifie rien ! Je veux simplement dire que ce qui arrive était prévisible, que l’indifférence, le mépris, le clientélisme électoral, l’incompétence et la cupidité ont créé le terreau dans lequel fleurit aujourd’hui le fondamentalisme.
Aujourd’hui nous payons des décennies d’indécision, de gestion absurde, de rejet et d’incompréhension.
Si le premier ministre avait un tant soit peu de courage, il viendrait devant les français demander pardon au nom de tous les politiques des 50 dernières années pour avoir conduit la France à cette catastrophe.
En attendant, les bombes explosent et c’est de la faute des seuls musulmans.