Lettre ouverte au Président Macron : « Changez nos institutions et démissionnez ! »


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La présente lettre ouverte est libre de droit. Chacune et chacun, gilet jaune, gilet vert, gilet rouge, sans gilet et sans-culottes, stylo rouge ou craie blanche, chacune et chacun peut s’en emparer. C’est un texte citoyen et un outil de lutte.

 


 

 

« Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est pour le peuple, et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs »

                           Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1793

 

                                                                                 Le 1erjanvier 2019

Monsieur le Président,

 

En moins de 18 mois votre politique a mis notre pays dans un état de violence jamais atteint. Vos réformes et votre exercice du pouvoir sont aujourd’hui rejetés par une majorité de Français. La contestation populaire incarnée par le mouvement des Gilets jaunes est forte, durable et légitime.

Il convient que vous considériez avec attention les responsabilités qui sont les vôtres dans le déclenchement de cette révolte qui prend la forme d’une insurrection citoyenne. Si elle vient de loin, elle vient aussi de vous.

1. Vous avez commencé votre mandat avec une loi de moralisation de la vie publique. Or les Français constatent chaque jour des pratiques qui relèvent du népotisme, de l’affairisme et de la privatisation de l’État au profit d’intérêts personnels. L’affaire Benella n’est que le symptôme le plus visible et le plus lamentable, non seulement d’une confusion entre les responsabilités publiques et les intérêts privés, mais encore d’un amateurisme confondant et d’une inquiétante désorganisation de l’État.

2. Vous affaiblissez méthodiquement les services publics en supprimant des dizaines de milliers de postes de fonctionnaires. Vous aggravez les inégalités sociales et territoriales par de multiples réformes non concertées qui affectent toute la population : la jeunesse, les salariés, les sans emploi et les retraités. Après l’école, l’université, la santé, le Code du travail, la SNCF et la Justice, vous entendez vous attaquer aux retraites, à l’assurance chômage et à l’ensemble de la Fonction publique. Si les citoyens vous laissent faire, vous aurez dilapidé au terme de votre mandat ce qu’il leur reste de protection sociale, démembré les services publics et parachevé le grand œuvre de destruction des acquis du Conseil national de la résistance.

3. Vous avez imposé vos réformes par une pratique autoritaire du pouvoir, en abusant des ordonnances, en bafouant la représentation nationale, en muselant votre propre majorité et en contournant systématiquement le dialogue social. Et ce que le peuple n’oubliera pas, c’est que vous ayez à de multiples reprises manifesté une condescendance et un mépris sans borne pour les citoyens ordinaires, les oppositions, les élus locaux et les corps intermédiaires.

4. Face à la contestation sociale, vous avez fait le choix de la répression policière et judiciaire, avec son lot de violences et d’arrestations préventives et arbitraires. Vous mettez notre pays un peu plus chaque jour en dehors du droit. Les délinquants financiers courent, quand des lycéens et des manifestants pacifiques sont enfermés. Vous ne pouvez persister dans cette voie, au risque de bafouer plus encore les libertés fondamentales, dont vous êtes pourtant le garant.

5. Enfin, alors que vous vous êtes fait le chantre au niveau mondial de la lutte contre le réchauffement climatique, votre politique environnementale est demeurée indigente, vous refusez toujours de faire payer les plus gros pollueurs de notre pays et vous mettez à contribution les plus défavorisés et les classes moyennes. En protégeant systématiquement les intérêts des grands groupes industriels, vous mettez l’Etat au service des puissances de l’argent au lieu de servir le bien commun et de répondre aux défis des urgences sociales et climatiques.

De tout cela, Monsieur le Président, vous êtes comptable. C’est là votre vérité. Et si vos vœux étaient sincères, vous auriez compris qu’il n’y aura pas de dignité recouvrée pour les plus pauvres de nos concitoyens sans le rétablissement de l’ISF, sans augmentation des minima sociaux et du SMIC, sans un changement radical de politique, qui seul pourra faire naître un nouvel espoir.

Certes, face à la colère qui croît, vous faites acte de contrition et vous reconnaissez des erreurs. Mais vous feignez d’entendre et ne proposez dans l’improvisation que des demi-mesures. Vous persistez à maintenir le cap de votre politique ultra-libérale qui est vouée à l’échec, qui ne fait pas baisser le chômage, qui favorise les plus riches, appauvrit les plus pauvres et fait le lit d’une extrême droite que vous instrumentalisez à des fins électorales.

Certes, vous proposez deux mois de débat national et des cahiers de doléance. Mais cette consultation n’endormira personne et ne suffira pas à éteindre les aspirations légitimes du peuple à plus de justice fiscale et sociale, à plus de liberté et d’égalité, et surtout à une autre manière de gouverner. Car, ce à quoi nos concitoyens aspirent majoritairement aujourd’hui, c’est à un changement politique et institutionnel radical. C’est cette demande qu’il faut entendre en priorité.

Certes, vous pourriez envisager la dissolution de l’Assemblée nationale, ce que certains vous demandent de faire. Mais une dissolution ne changera rien aux dysfonctionnements de notre pays et aux causes profondes de la révolte citoyenne : des institutions obsolètes, une crise majeure de la représentation, une République présidentialiste et anti-démocratique. 

Vous devez être conscient, Monsieur le Président, que le rejet massif de votre politique et la contestation populaire vous interdiront probablement la poursuite des réformes que vous avez programmées. Ce que vous voudrez imposer par la force sera contesté par la rue, au risque d’aggraver et de multiplier les désordres de notre pays.

Il vous revient par conséquent de prendre acte de cette situation historique et de considérer désormais la seule voie de transformation radicale qui soit à cette heure praticable : changer en profondeur nos institutions, et non faire un toilettage à votre convenance. À cette fin, vous disposez du pouvoir de provoquer un référendum par lequel vous demanderez au peuple de se prononcer sur la mise en place d’une Assemblée constituante qui aura pour tâche de rédiger une nouvelle constitution pour notre pays. Au terme de ce processus, qui peut être conduit dans la nouvelle année, il vous reviendra, ainsi que l’implique le changement de constitution, de remettre votre démission.

L’histoire a voulu, Monsieur le Président, que vous accédiez à la plus haute fonction à la fin d’un cycle institutionnel : la 5èmeRépublique est à bout de souffle. Certains considèrent qu’elle est déjà moribonde. Quoi qu’il en soit, votre exercice du pouvoir en a exacerbé les travers, ce que rejettent les Français qui appellent à votre démission.

Vous avez voulu vous faire élire comme un président réformateur. Afin que votre présidence soit enfin utile à nos concitoyens, ayez le courage de la seule réforme qui vaille : changez radicalement nos institutions et démissionnez ! Il est dans l’intérêt de notre pays que vous laissiez le peuple libre de réinventer la politique et de concevoir collectivement une nouvelle République, sociale, égalitaire, écologique et démocratique!

Monsieur le Président, le peuple de France ne vous appartient pas. Conscient et lucide, il reprend son destin en main. Vous ne l’arrêterez pas. La sagesse vous recommande d’écouter maintenant cette force qui va.

 



01/01/2019
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