En ce début 2017, le cauchemar prend forme.
a France entre dans la dernière ligne droite de la présidentielle : vous savez, cet exercice quinquennal qui fait voler en éclats la belle unité nationale : qui réveille les ambitions et permet les dérives d’un corps électoral dans le doute. Pourquoi cauchemar ? J’exagère ? Des gens très intelligents s’usent à me rassurer pourtant.
Ils ne manquent pas d’arguments : du moins le pensent-ils.
A les entendre, Marine Le Pen ne peut pas être élue : ils en sont convaincus, cela relève de l’évidence. Bien fol qui penserait le contraire.
Mais au-delà du vernis de leurs certitudes, pourquoi Marine Le Pen ne pourrait pas être élue présidente ? Je connais la musique, on nous a déjà fait le coup. Ils appellent ça le sursaut républicain. Chirac lui doit la victoire, alors, en 2017, ce sera pareil… Un peu trop optimiste non ?
Je crois que ce que les éditorialistes de tous bords ne mesurent pas, c’est l’état réel de la société française, la colère qui submerge des millions de gens qui ne vivent plus que des galères, le fait que les électeurs se fichent pas mal des programmes en définitive : leur seul but pourrait devenir « faire sauter le système ». Ils se croient rassurants, ils ont de belles théories, et nous devrions les croire. Pourtant, le Brexit leur a échappé, l’élection de Trump leur paraissait impossible, Fillon n’avait aucune chance, Hamon n’existait pas ! Pas un pour faire son méa culpa, incapables de reconnaître l’erreur d’appréciation, l’incapacité à lire l’opinion, enfermés qu’ils sont dans leur microcosme à l’abri des tourments de la vie, soucieux de satisfaire leurs employeurs.
Je n’ai pas de boule de cristal électorale, je suis incapable de lire l’avenir électoral de mon pays. Je suis juste très inquiet. J’ai exprimé par petites touches cette inquiétude dans ce blog. Aujourd’hui, je fais l’effort d’en faire une synthèse.
Je suis inquiet car pour faire obstacle à Marine Le Pen, il faudrait que les adversaires aient des armes efficaces… Et fiables ! Hors, que voyons-nous ?
Fillon, la droite catho néolibérale qui se débat dans une sordide affaire d’emplois présumés fictifs et d’abus de biens sociaux : une batterie de casseroles dignes de Sarkozy !
Avec la nomination de Hamon, la certitude que le PS est définitivement mort lorsque l’on voit les parlementaire PS faire leurs valises et se précipiter chez le golden candidat Macron. Pardon de le dire donc, mais Le Pen peut gagner car son discours parle à tous ceux qui en restent à la surface des choses : un problème d’intelligence politique pour ne pas dire d’intelligence tout court. Elle a réussi le tour de force, avec ses copains du FN, à faire croire qu’elle seule pouvait répondre à la colère et redonner dignité et espérance. Elle et ses amis, bien que compromis dans un grand nombre d’affaires, ont réussi le tour de force d’apparaître comme les seuls à pouvoir laver plus blanc.
Le FN ment, mais son électorat potentiel s’en moque. Il se contente de slogans minimalistes destinés à désigner les responsables du mal être des français. Le Pen ment : à tout bout de champ : elle brandit comme des étendards quelques mots passe partout qu’elle aligne comme un crédo dévastateur. « Les élites », « le cosmopolitisme », « les immigrés », « le libre échange », voila les responsables. C’est simple, rapide, facile à comprendre. Elle a rallié la classe ouvrière trahie par la gauche, et une large tranche de la bourgeoisie qui ne supporte plus son déclassement.
Le Pen peut gagner et je le crains !
Elle peut gagner car le niveau de conscience politique des gens en âge de voter est proprement dramatique. Plus de culture politique dans un paysage médiatique confisqué par quelques fortunes, des « réseaux sociaux » où ils pensent trouver les réponses et qui déversent des flots d’informations détournées et préfabriquées. Des gens pour qui l’histoire de ce pays est une grande inconnue de laquelle ils sont bien incapables de tirer la moindre piste de réflexion.
Le problème est qu’il est bien impossible de savoir qui va aller voter, combien vont aller voter, et pour qui ils vont voter. Qu’est-ce qui va l’emporter au moment de mettre le bulletin dans l’urne ? La raison ou la colère aveugle.
Et la raison ? Quelle est-elle ? Quel candidat peut être porteur d’espoir. J’ai peur de la fascination du chaos, le désir de vengeance, notre médiocre classe politique ouvre la porte à la pire des solutions.
Je suis inquiet, d’autant que je n’entrevois aucune solution efficace.