Ce serait déjà assez.
é de parents marseillais
Riches d'aïeux provençaux
Dont un poilu médaillé
Fort peu fier de tant d'assauts
Le croiriez-vous, mais en somme
Je ne suis pas très Français
Si je n'étais qu'un peu d'homme
Ce serait déjà assez
Toujours, avant d'usiner
Un obus je veux savoir
Qui le prendra sur le nez
Et qui l'a en son pouvoir
Et si l'arsenal stoppait
Faute d'ogives à faire
Faudrait-il cesser la paix
Au nom d'emplois nucléaires?
Je ne veux pas me gaver
En affamant le Chilien
Ni voir mon boulot sauvé
Grâce au chômeur italien
Ni exhiber un diamant
En chair de Sud-Africain
Ni chausser du caïman
En peau de Portoricain
Je peux, sans être obséquieux
Rouerie qu'il brocardait tant
Dire comme Montesquieu
Le fit il y a longtemps
Que je tiens pour condamnable
Telle chose qui serait
A mon peuple profitable
Mais qui d'autres ruinerait
Car, si nécessairement
On ne peut qu'être être humain
Ce n'est que fortuitement
Qu'on naît Chinois ou Roumain
J'ajoute que, pour ma part
Des pôles à l'équateur
Je ne distingue, au départ
Qu'exploités et exploiteurs
Entre un grand patron gascon
Et un éboueur malien
Je me sens vers le second
De bien plus solides liens
Entre un actionnaire aixois
Et un docker javanais
Le docker, si con qu'il soit
Est seul de ma maisonnée
Mais d'un Botha de merde et
D'un sous-blondin nazillon
Si je les mets sans tarder
Sous le même pavillon
Je traîne le sentiment
Que de deux salauds classés
L'est bien plus honteusement
Celui qui se dit Français
Né près d'un port marseillais
Au pittoresque tableau
Que l'usine a endeuillé
En lâchant ses pets dans l'eau
Le croiriez-vous mais, en somme
Je ne suis pas très Français
Si je n'étais qu'un peu d'homme
Ce serait déjà assez
Si je n'étais qu'un peu Homme
Ce serait déjà assez.
Marius Vinson